Damo 다모/조선 여형사 다모,
Le tournage de Damo donne à la comédienne l’opportunité de pratiquer toutes les disciplines dont elle a appris les bases lorsqu’elle commençait sa préparation pour devenir actrice. Encouragée par sa mère, qui était très présente auprès d’elle à l’époque, la jeune femme débutait son entraînement dès l’aube, en courant sur un parcours difficile en montagne, avant de poursuivre la journée avec l’équitation, la danse jazz, l’hapkido (art martial coréen) et le kendo, pour terminer le soir par l’escrime au sabre, le tout en étudiant l’art dramatique en parallèle, bien sûr, car pour l’acteur, le théâtre1 reste essentiel.
Damo est une adaptation de Joseon Female Detective Damo, un manhwa publié, en 1994, sous la forme d’une bande dessinée quotidienne dans le journal Sport Séoul. L’histoire est celle de Jang, petite fille orpheline devenue servante malgré ses huit ans, et de Hwangbo Youn, jeune homme dont le père, un magistrat, est également celui de la fillette, qu’il a conçue avec une roturière. Hwangbo Youn gardera Jang auprès de lui comme une petite sœur. Lorsqu’il sera formé au maniement des armes par le moine Suwol afin de devenir fort et savoir se contrôler, elle restera près de lui et bénéficiera de la même formation. Devenu adulte, Hwangbo Youn (Lee Seo-jin) sera commandant du bureau de police du Quartier gauche, à Hansung, tandis que Jang prendra le nom de Jang Tchaeok, qui signifie Jang de Belles couleurs, et sera damo, c’est-à-dire serveuse de thé. Mais son activité ne se limitera pas à servir le thé puisqu’elle occupera ce poste dans le bureau de police dont Hwangbo Youn est le commandant, ce qui veut dire qu’officieusement (les femmes n’ayant pas accès à la carrière militaire), elle aura la fonction d’enquêtrice.
Un personnage déluré qui court très vite, Mah Tchoukji (Lee Mun-shik2), sera son assistant tout au long des quatorze épisodes.
Le tournage à Daegwallyeong, dans la province de Gangwoon, se fera sous d’importantes précipitations neigeuses. Il fallait marcher prudemment et par endroits, la neige3 arrivait jusqu’en haut des jambes. En attendant que les opérations de déneigement se terminent, les membres de l’équipe seront logés dans une pension où ils durent partager leur chambre. Seule Ha Ji-won disposait de la sienne propre. « Malgré cette situation compliquée, constata-t-elle, tout le monde riait. Ils étaient de bonne humeur. Ils fabriquaient des skis en bambou, faisaient des plaisanteries. » La comédienne gardera un très bon soiuvenir de ce tournage.
1 Le théâtre coréen est, à l’origine, un théâtre masqué. Le cinéma coréen débute en 1919, pendant l’occupation japonaise. Les premiers films, qualifiés de cinédrama, s’inséraient dans les spectacles de théâtre. L’expression par les acteurs sociaux des sentiments comme la colère, la malice, l’amour, était alors très codifiée et l’est encore assez précisément, notamment par la théâtralisation de la tradition (Antoine Coppola Le cinéma sud coréen : du confucianisme à l’avant-garde). On retrouve ainsi parfois, dans le jeu théâtral des acteurs coréens, des mimiques, des expressions de voix ou de visage stéréotypées selon le code ancien pour traduire les émotions correspondantes.
2 Lee Mun-shik, comédien charismatique, retrouvera Ha Ji-Won quelques années plus tard dans Empress Ki, série dans laquelle il interprète le rôle de l’inénarrable eunuque Bang Shin-woo.
3 Comme elle le précise dans son ouvrage This Moment, Ha Ji-won aime la neige. Peu importe si la voiture est bloquée ou si la route est glissante ! La première neige de l’année, c’est également la possibilité de faire un vœu qui se réalisera et la comédienne ne manque jamais ce moment particulier.
Secret Garden 시크릿 가든
Physiquement et moralement éprouvée par le tournage de Sector 7, Ha Ji-won, qui disait : « Un film d’action, c’est amusant… » trouva que ça l’est beaucoup moins lorsqu’il s’agit de combattre des chimères sur un fond vert. Une fois terminé le film du réalisateur Kim Ji-hoon, la comédienne eut du mal à se débarrasser de la guerrière combattant un monstre marin indestructible qu’elle venait d’interpréter alors qu’elle devait se préparer pour tout autre chose… En effet, une comédie écrite sur un scénario de Kim Eun-sook l’attendait : Secret Garden, un drama fantastique comme la comédienne aime. Kim Eun-sook précisera au sujet d’Ha Ji-won, dont l’emploi du temps était très chargé, qu’elle n’avait pas le temps de dormir. « Lorsqu’on lui avait donné une heure de repos, elle revenait après trente minutes d’exercice et trente minutes de douche. Elle sautait à la corde pendant trente minutes, car elle savait que s’il elle dormait, son visage serait gonflé. »
L’histoire de Secret Garden nous entraîne dans la rencontre improbable entre deux personnages que tout oppose : d’un côté, le riche propriétaire d’une chaîne de magasin, Kim Joo-won (Hyun Bin) qui prend la relève de son père à la tête du conseil d’administration, personnage autoritaire, dominateur, méprisant totalement son personnel, n’ayant aucune considération dans les rapports humains, et de l’autre, la cascadeuse Gil Ra-him (Ha Ji-won), généreuse de caractère, et jalousée par les autres femmes parce qu’elle est jolie, sportive, et que les hommes s’intéressent à elle. Y compris Kim Joo-won, qui ne le montre pas dans un premier temps.
En regardant la jeune femme s’entraîner au sabre japonais, Kim Joo-won se demande s’il n’est pas atteint du syndrome d’Alice au pays des merveilles. « C’est une maladie fascinante et triste, qui modifie la perception : on voit tout à l’envers, comme dans un télescope, à croire qu’on vit dans un conte de fées ! Je suis malade, c’est certain. Sinon, pourquoi chaque moment passé avec cette fille banale ressemblerait à un conte de fées ? »
Inaugurée par un conflit, la relation entre les deux protagonistes va prendre une tournure inattendue et fantastique lorsqu’une magicienne, habitant dans la forêt de Secret Garden, leur fera boire une potion dont les effets vont les transformer en interchangeant leurs caractères. Ha Ji-won se retrouvera dans la peau de Hyun Bin, avec son esprit dominateur et autoritaire, et Hyun Bin devra jouer le rôle de Ha Ji-won, soumise et modeste. Ce changement provoquera l’incompréhension dans l’entourage de chacun, mais il sera salutaire pour l’un, qui devient un peu plus humble, plus modeste, et pour l’autre, qui se laisse moins victimiser, comme c’était le cas pour Gil Ra-him.
« La transformation de chacun qu’impliquait la permutation de nos rôles a été intéressante et drôle à jouer, diront les comédiens lors d’une conférence de presse. Nous avons beaucoup parlé entre nous en privé, nous nous sommes entraidés, observés mutuellement pour apprendre à nous connaître et à nous comprendre et tout le processus de tournage s’est déroulé confortablement. » Plus confortablement pour la comédienne que le précédent, qui lui avait laissé quelques séquelles... Il y eut malgré tout quelques blessures sur ce tournage, ce qui, comme toujours dans de tels cas, inquiètera sa famille. Ainsi, en se concentrant sur le jeu de son partenaire en Kim Joo-won, Ha Ji-won parvint-elle à reproduire sa gestuelle, et notamment les mouvements des doigts de Hyun Bin lorsqu'il exprimait son personnage. Le directeur de la photo avait ainsi conseillé Ha Ji-won, particulièrement sur sa position assise. Il fallut également à la comédienne, qui a une certaine propension à rire facilement — et les fous rires sur le tournage ne manquaient pas — qu’elle contrôle cette tendance en expérimentant certaines méthodes qu’on lui avait conseillées.
Parmi les personnages secondaires qui entourent Kim Joo-won et Gil Ra-him, on trouve en premier lieu Oska (Yoon Sang Hyun) le chanteur. Cousin de Kim Joo-won, Oska est une popstar sur le déclin dont Ra-him est fan, ce qui agace énormément Joo-won. Les deux cousins sont régulièrement en conflit. Autre personnage d’importance : Youn Seul (Kim Sa-Reng), riche héritière qui cherche à se venger du comportement de Oska vis-à-vis d’elle. N’oublions pas le chef de l‘équipe de cascadeurs, Im Jong-soo (Lee Philip), amoureux discret de Ra-him, et notons également la présence de Lee Jong-suk dans la distribution.
Comme dans tous les dramas et films coréens, les seconds rôles jouent admirablement leur personnage : cynique, émouvant ou drôle, quelquefois même très drôle ou très émouvant, mais avant tout inoubliable.
Secret Garden fut un grand succès populaire. Le public s’identifiait au personnage ordinaire de Gil Ra-him interprété par Ha Ji-won. Il y avait une osmose entre lui et la comédienne. Les gens la reconnaissaient dans la rue, lui souriaient.
La collaboration du réalisateur Shin-woo et de la scénariste Kim Ji-hoon — qui ont travaillé ensemble pour produire de nombreuses séries télévisées populaires — a été déterminante dans le choix des deux comédiens Hyun Bin et Ha Ji-won pour jouer dans la série. Lorsqu’on avait demandé à Ha Ji-won, en 2011, le genre de vie qu’elle choisirait parmi celles qu’elle a vécues dans les dramas et les films qu’elle a tournés, sa réponse avait été, sans une seconde d’hésitation : celle de Gil Ra-Im de Secret Garden.
Un clin d’œil aux rôles de Ha Ji-won lors des entraînements des cascadeurs avec le personnage de Cha Hae-joon, qu’elle interprète dans Sector 7, ou de Janghae-ok dans Damo, sans oublier Myung-ran, la jeune boxeuse de Miracle on 1st Street.
Kim Eun-sook est une scénariste très populaire qui a écrit, entre autres, Lovers in Paris (2004), Secret Garden (2010), Descendants of the Sun (2016), Mr. Sunshine (2018) et The Glory (2022-2023)
The King two Hearts 더킹 투하츠
Le terme de « chef-d’œuvre », employé par Carolyne Leroy dans l’excellente critique qu’elle consacre à cette série, est tout à fait justifié. Ha Ji-won (Kim Hang-ha) y est officier d’élite des forces spéciales nord-coréennes et fille d’un haut fonctionnaire nord-coréen. Pour se préparer, s’immerger dans la peau de son personnage, la comédienne a dut apprendre à parler le dialecte nord-coréen, dialecte qu’elle a su édulcorer de sa propre expression féminine pour en rendre le ton moins raide. Son professeur, présent sur le tournage, lui apporta beaucoup de renseignements sur la Corée du Nord, les instructeurs des forces spéciales, les femmes soldats…
Il s’agit d’une uchronie sur le thème de la réunification des deux Corées, la Corée du Sud étant dans l’histoire un royaume. Le premier épisode commence avec la famille royale, confortablement installée dans son salon devant le poste de télévision, qui assiste à la chute du mur de Berlin, A travers ces images, oh ! combien symboliques dans le contexte des deux Corées, c’est bien sûr le désir d’un peuple opprimé de se réunir à son alter ego démocrate que le film nous montre.
Le roi y transmet à son fils aîné, le prince Lee Jae-Kang (Lee Sung-min), l’idée de réunification des deux Corées. Devenu roi, celui-ci organisera ce rapprochement avec les responsables nord-coréens en élaborant un programme d’entraînement militaire conjoint pour trois Coréens du sud et trois Coréens du nord en vue de leur participation commune au World Officiers Championship (WOC). Le prince Lee Jae-ha (Lee Seung-gi), frère cadet du roi à l’esprit frivole, devra faire partie de l’équipe de Corée du Sud, sous le commandement de Kim Hang-ha (Ha Ji-won), qui dirigera les deux équipes. Les deux jeunes gens s’affronteront puis, à travers de multiples péripéties, finiront par s’aimer et Lee Jae-ha, devenu roi à la suite de l’assassinat de son frère, épousera Kim Hang-ha.
Si le rebelle Jang Sungbaek, dans la série Damo, représentait « l’amour chaud » aux yeux du personnage qu’interprétait Ha Ji-won, dans The King two Hearts, ce sera plutôt « l’amour comme une bombe, qui pouvait exploser à tout moment. » La tension entre le Nord et le Sud reposait sur leurs épaules. La comédienne précisera dans son ouvrage : « Mon cœur tremblait en le regardant et la pointe de mon couteau tremblait parce que je sentais l’amour irréversible dans son regard. »
À travers les rôles que la comédienne interprète dans ses films et dramas, la sensibilité pour le père est un thème qui revient régulièrement. Dans The King two hearts, le personnage de Kim Nam-il (Lee Do-gyung), ministre de l’Unification, donne l’image d’un père très attaché à sa fille, qui n’hésite pas à s’agenouiller aux pieds du prince, comme on faisait sous la dynastie Joseon, pour lui témoigner son respect et lui parler tendrement de celle qui, ayant perdu sa mère à la naissance, a grandi sans amour maternel.
Le personnage interprété par Ha Ji-won, malgré les dehors autoritaires d’une femme gradée qui sert dans l’armée depuis dix ans, garde sa féminité en prenant par moment les poses d’une midinette qui aimerait trouver un compagnon, le seul problème restant son côté brusque et violent, qui décourage les éventuels candidats. Y a-t-il des points communs entre Hang-ha et Ji-won ? « Il y en a, surtout lorsque je suis concentrée. Mon ton de voix devient alors très dur », précise la comédienne.
« L’objectif était de devenir une femme nord-coréenne avec laquelle les Sud-Coréens aimeraient être amis. Je voulais démontrer que le personnage de Hang-ha que j’interprétais et qui vit dans le nord n’est pas différent de nous, en espérant qu’un jour, la Corée du Nord pourrait regarder avec plaisir ce drama. »
Le tournage terminé, les deux comédiens Ha Ji-won et Lee Seung-gi joueront chacun de son côté dans une série de grande ampleur. Pour Lee Seung-gi, ce sera Gu Family Book, réalisé par Shin Woo-seol (Secret Garden), un conte mélangeant légende et histoire, raconté comme une bande dessinée, dans lequel il interprète un gumiho, un être mi-homme mi-monstre qui veut devenir humain, à la recherche d’un vieux livre renfermant le secret pour que la transformation réussisse… Du côté de Ha Ji-won, commencera le tournage, qui durera presque une année, d’une série en 51 épisodes : Empress Ki, une fresque historique se déroulant sous la dynastie mongole Yuan, qui régna sur la Chine et la Corée au XIIIe siècle. Mais cela est une autre histoire…
The King two hearts, un chef d’œuvre politique et romanesque, par Carolyne Leroy, StellarSisters du 25 août 2013.
Lee Sung-gi fait partie des Petits frères de la
Nation, jeunes gens devenus célèbres dès la fin de l’adolescence comme chanteurs, acteurs,
mannequins ou sportifs, dans la culture de Corée du Sud, à qui l’on décerne ce titre honorifique, équivalent masculin des Petites sœurs de la Nation.
The World Officer Championship (WOC), qui figure dans le film, est un championnat du monde des officiers rassemblant les militaires de nombreux pays. Le Nord et le Sud de la Corée prennent part à cette manifestation en formant une seule équipe. Lors de ces épreuves, la Corée doit affronter les USA. Un échange entre l’officier américain et la jeune officière coréenne témoigne de l’importance que représente ces championnats pour la Corée.
À l’officier américain qui s’exclame : « Mais ce n’est qu’un jeu ! », Kim Hang-ha (Ha Ji-won) répond d’un air triste, au bord des larmes : « Comment cela peut-il être un jeu ? Pour nous, la victoire est cruciale. La vie des personnes que nous aimons est en jeu, ainsi que celle du roi. Avez-vous été séparé de votre famille avant ? Pouvez-vous comprendre le sentiment de gens qui vivaient ensemble depuis des milliers d’années, qui partagent une même langue, une même Histoire, et qu’on a divisés en deux peuples en une fraction de seconde ? En trois ans de guerre civile, les gens ont perdu leurs parents, leurs frères… » Puis le ton monte du côté de la Coréenne : « L’expérience de perdre des membres de sa famille, avez-vous vécu ça ? Pour vous, c’est peut-être un jeu, mais pour nous, la victoire est cruciale ! »
Yoon Yeo-jeong est une comédienne vétérane des séries et films coréens mais également de la scène. Elle a débuté sa carrière en 1971 dans Fire Woman, réalisé par Kim Ki-young, pour lequel elle fut récompensée du prix de la meilleure actrice au festival de Sitges. Ce sera la première d’une longue série de récompenses, jusqu’à l’Oscar, en 2021, de la meilleure actrice dans un second rôle pour son interprétation dans le film réalisé par Lee Isaac Chung : Minari. Cette grande dame, dont le naturel, la simplicité et la générosité dans le jeu sont remarquables, interprète Bang Yang-seon, la reine douairière, dans la série The King two Hearts. Une très jolie scène entre la reine douairière et Kim Hang-ha (Ha Ji-won) nous montre la mère du roi qui, après avoir compris les valeurs morales de la jeune femme, lui témoigne à sa façon qu’elle l’accepte comme belle fille, en lui donnant la recette des petites palourdes de vase que lui a transmise sa belle-mère, la reine précédente.
Lee Soon-jae, autre acteur vétéran, participe à cette série en jouant le secrétaire en chef Eun Kyu-tae. Ce grand comédien, passionné de théâtre et admirateur de Laurence Olivier et des pièces de Shakespeare, commence sa carrière sur les planches, alors qu'il est encore étudiant à l'université nationale de Séoul, en interprétant un rôle dans Roméo et Juliette. Le théâtre, pour lui, est essentiel et doit faire partie des expériences de l'acteur. Lee Sung-jae est un monument de la Corée, à travers ses rôles à la télévision — où il a débuté en 1961, avec le premier
drame de KBS Dois-je devenir humain aussi ? — et sur scène, où il monte pour la première fois en 1956, dans la pièce du dramaturge américain Eugène O'Neill, Au delà de l'horizon. Sa devise est : « Continuer à agir tout au long de la vie »
Lee Sung-min est avant tout un homme de théâtre. Entré à l'âge de vingt ans dans une compagnie, il remporte le prix du meilleur acteur au Festival nationale de Théâtre. Il s'est habitué à jouer devant la caméra avec le même naturel que sur les planches. Il reste spontané. C'est pour ça qu'on l'apprécie. C'est la marque des grands comédiens. Il n'a pas besoin de surjouer. Dans la série Misaeng, il interprète un responsable d'équipe dans une société d'import-export de Séoul. La série montre sans concession le milieu professionnel du commerce et de la finance, le respect de la hiérarchie et la vie compliquée des stagiaires, en début de carrière. Le personnage de Oh San-sik, interprété par Lee Sung-min, est plus vrai que nature. Il ressemble à ces chefs de service que certains ont connus dans leur milieu professionnel ou auraient aimé connaître. Il joue le rôle naturellement. C'est ce qui fait son talent. En 2023, il interprète un brave chauffeur de taxi qui accepte, bien qu'il ait terminé son service, de conduire un client qui s'avère être un tueur en série, psychopathe impassible, étonnement interprété par You-Yeon-seok. Cette série nous entraîne dans un road movie terrifiant, dont le troisième personnage, interprété par l'excellente Lee Jung-eun, poursuit sans relâche le meurtrier de son fils. Une série d'une extrême violence, dont personne ne sort indemne, y compris le spectateur. Dans The King two hearts, Lee Sung-min interprète le fils aîné du roi, qui deviendra à son tour roi de Corée du Sud, dans le cadre d'une monarchie constitutionnelle. Son but sera principalement de réussir le projet de son père : la réunion des deux Corées. Ce sera son frère cadet Lee Jae-hae (Lee Seung-gi) qui, devenant roi à son tour, mettra en place cette réunification. Dans cette uchronie mouvementée, Lee Sung-min interprète ce frère aîné tolérant et touchant, à l'image du grand comédien qu'il représente.
L’Impératrice Ki 기황후
Ce personnage de femme travestie en guerrier qui finira par devenir impératrice de l’empire mongol est probablement l’interprétation la plus accomplie de la comédienne et l’un des rôles les plus marquants de sa carrière. Depuis l’Impératrice Ki, les noms de Ha Ji-Won et Seung Nyang-Ki sont liés dans l’esprit du public comme Peter Falk et Columbo ou, chez nous en France, Jean-Claude Drouot avec Thierry la Fronde. On ne peut cependant comparer ce qui n’est pas comparable. En effet, bien que ces acteurs soient auparavant apparus dans d’autres excellents rôles à l’écran (ou sur scène pour Jean-Claude Drouot), ils n’étaient pas pour autant populaires avant d’interpréter les deux personnages cultes qui les ont fait connaître. Ha Ji-Won était déjà populaire avant Seung Nyang-ki. Elle est devenue populaire en Asie dès le début des années 2000 en jouant dans plusieurs séries et films à succès, puis très populaire avec Damo, Secret Garden et The King two hearts, ainsi que certains rôles pour le grand écran. Elle est devenue populaire en Europe avec The Empress Ki et en France en 2014, avec la diffusion de la série sur Netflix.
Contexte historique
Il s’agit d’un drame historique situé dans la dernière partie de la dynastie Yuan, dynastie mongole fondée par Kubilai Khan, le petit-fils de Gengis Khan, qui règnera sur la Chine jusqu’en 1368. Le royaume de Goryeo s’étendait alors sur la péninsule que se partagent les actuelles Corées du Nord et du Sud. Envahi par les Mongols, il restera sous domination Yuan jusqu’à ce que la victoire du général Yi Seonggye, à la fin du quatorzième siècle, y établisse la dynastie des rois coréens pour la période Joseon.
Sur cette trame de fond, se déroule le parcours d’une femme, de l’état de servante qui préparait le thé à celui de concubine, du statut de fille d’un commandant au service du roi de Goryeo à celui dl’impératrice, épouse du dernier empereur de la dynastie Yuan.
La fiabilité de ce récit au regard de l’Histoire suscite la controverse. Au-delà de l’exactitude approximative des faits, les critiques des historiens coréens s’attachent au personnage de l’impératrice Ki, dont le tempérament positif apparaît peu crédible. Pour sa défense, le scénariste Jung Kyung-soon précise qu’il s’agit d’une histoire romancée : « Si l’inspiration du drame provenait de l’impératrice Ki, des libertés créatives ont été prises avec le personnage de l’héroïne, dont le nom, Ki Seung-nyang, est également fictif. »
Rédigé par les scénaristes au fur et à mesure de l’avancement du tournage, le déroulement du récit s’est progressivement dévoilé au fil des épisodes, dont le nombre total n’était pas fixé à l’avance. Personne ne savait donc comment se terminerait l’histoire.
Achevée en 2014, la série s’étend sur 51 épisodes. Le tournage s'est effectué principalement dans le parc Yongin Daegenggeum, dans la grande banlieue de Séoul, mais également en Chine, aux Hengdian World Studios, où ont notamment été reconstitués les bâtiments du palais impérial.
Ji Chang-wook
Jinterprète Ta Hwan (Thogon Temür), le dernier empereur de Chine de la dynastie mongole Yuan1. Ce rôle aura été une opportunité et un tournant dans la carrière du comédien. Lors d’une interview réalisée pendant le tournage de la série, il précise qu’il tourne beaucoup de scènes d’émotions et que c’est particulièrement épuisant. Son personnage est souvent vexé et devient très sensible, même s’il apparaît qu’il devient plus fort, au fur et à mesure du déroulement de l’histoire, Ta Hwan est en fait de plus en plus faible et solitaire.
1La dynastie mongole, fondée en 1271 par Kubilai Khan, le petit-fils de Gengis Khan, régna sur la Chine jusqu’en 1368.
Joo Jin-mo interprète Wang-Yoo, le roi Chungsuk de Goryeo. Pour ce personnage, comme pour celui de l’impératrice Ki, la vérité historique n’a pas été respectée. Loin du roi chevaleresque et romantique du film, Wang-Yoo était en réalité un être brutal qui violait et tuait des femmes.
Joo jin-mo se préparait à jouer dans un autre drame quand il reçut le scénario d’Impératrice Ki. Il n’était donc pas d’emblée prévu pour lui qu’il rejoigne ce tournage, et d’autant moins que ses précédentes expériences dans le genre historique lui laissaient un souvenir mitigé. Il n’avait donc pas lu le scénario. Mais son intérêt pour le film a grandi quand il a su que sa partenaire serait Ha-Ji-Won. Cela fut déterminant dans sa décision et, par la suite, il louera avec beaucoup d’admiration Ji-Won pour ses grandes valeurs. Il la décrit comme une comédienne qui fait de son mieux : « Elle était incroyable ! Elle ne laissait jamais voir qu’elle était fatiguée. »
La résistance à la fatigue de la comédienne revient souvent dans les témoignages de ses partenaires sur ce tournage, comme dans celui de Ji Chang-Wook : « Parce qu’elle est l’héroïne, il y avait beaucoup de scènes avec elle qui demandait de rester debout toute la nuit et cela pendant trois ou quatre jours de suite. Les acteurs étaient fatigués mais Ji-won restait joyeuse malgré la fatigue. Elle riait souvent, ce qui détendait tout le monde sur le plateau. »
L’acteur Yoon Yong-hyun — qui campe l’un des trois compagnons du roi de Goryeo, avec l’eunuque Bang, interprété par l’inénarrable Lee Moon-Sik et Kwo Oh-jong dans le rôle de Choi Moo-sung — a quant à lui déclaré que Ji-won est la meilleure actrice qu’il ait connu et qu’elle donne « l’image de la santé et du talent. » Pour lui, c’est sûr, elle deviendra dans les temps futurs la plus grande actrice de Corée du Sud.
Joo Jin-Mo gardera une solide amitié avec ces trois acteurs, avec lesquels il partagea des crises de rigolades derrière la caméra, lors de scènes qui n’était pas particulièrement drôles et demandaient des larmes et de l’émotion !
Jin Yi-Han est, dans le rôle de Tal Tal, le neveu de Baek Ahn (Kim Young-ho), général mongol, chancelier de l’empereur Thogon Temur. Personnage discret à l’amour platonique et protecteur, il sera toujours présent auprès de Seung Yang. Le comédien parle ainsi de sa partenaire : « Nous nous sommes beaucoup aidés mutuellement pendant le tournage. Nous avons beaucoup bavardé. Nous nous sommes donné des conseils, ce qui nous a beaucoup aidé. » Il précise également que « lorsqu’un acteur discute avec son collègue, on peut dire que c’est bénéfique pour les deux parties. Ha Ji-won et moi avons fait beaucoup d’efforts pour comprendre les sentiments de l’autre, ce qui nous permit de tourner de nombreuses scènes intéressantes. Comme nous avons le même âge, nous n’avions pas trop de formalités de convenance à respecter lors du tournage, ce qui a produit une bonne synergie. » Il précise que la comédienne « donnait des indications et suggérait des expressions aux autres acteurs. Elle aimait plaisanter. Elle ne s’intéressait pas seulement à son propre jeu, mais aussi à celui des autres acteurs. »
Autre témoignage, celui de Kim Jin-Sung, qui joue l’enfant de Seung Nyang et Wang-Yoo. Il exprime sa reconnaissance à Ji–won pour l’avoir toujours serré dans ses bras sur le tournage. Les enfants de Corée du Sud sont magnifiques à l’écran et jouent leurs rôles avec une précision étonnante. Kim Jin Sung et, pour ne citer qu’eux, la jeune Park So-Yi dans le film Pawn de Kang Dae-Gyu, ou bien Shim Eun Kyung, qui interprète Hwang Gini à l’âge de douze dans la série, représentent des générations futures pleines de promesses.
Ha Ji–Won, à l’instar de son personnage Seung Nyang, protège ceux qui l’entourent, les conseille, les guide comme une sunbae, une noona1 qui est respectée, aimée, avec qui l’on partage le rire, la joie. Le tournage n’était pas toujours facile pour les comédiens mais sa générosité, sa bonne humeur apportaient du courage à ceux qui en avaient besoin. Il y eut pas mal de fous rires également sur ce tournage, des répliques improvisées. Ji Chang-Wook précise qu’environ soixante-dix pour cent des répliques qu’il avait avec Jo Jae-Yoon (qui interprétait Golta, l’eunuque de l’empereur) étaient improvisées, particulièrement lorsqu’il le bousculait. Ha Ji-won dut pour sa part improviser une danse à partir de ces simples indications : « L’empereur imagine Seung Nyang danser, tourner et rire. »
Avant d’être une série que le téléspectateur coréen a pu suivre sur le réseau privé MBC TV d’octobre 2013 à avril 2014, L’Impératrice Ki est avant tout un scénario écrit comme un roman d’aventure sur fond historique, ce qui donne le sentiment de voir une bande dessinée. Malgré quelques incohérences, ce drame reste une très belle œuvre, dont tous les personnages sont magnifiquement interprétés. Avoir participé à cette aventure marquera probablement la carrière de chacun des comédiens, quel que soit le rôle qu’il y aura joué.
Ce sera d’autant plus le cas des débutants, comme la jeune Park Ha-na qui joue l’une des concubines mongoles de l’empereur et pour qui c’était l’un des tous premiers rôles.
Baek Jin-hee interprète brillamment l’impératrice Tanashiri*, fille du grand conseiller Yeon Chul (Jeon Gook-hwan). La jeune femme, première épouse de l’empereur, sera rejetée dès sa nuit de noce par ce dernier, qui voit en elle le visage de son père, le grand conseiller. L’impératrice subira les vexations, les moqueries des servantes qui parlent entre elles dans son dos. Le parfum d’une plante toxique, cadeau empoisonné de l’impératrice douairière (Kim Seo-hyung), la rendra stérile. Objet de toutes les malveillances, Tanashiri va se rebiffer et cherchera à se venger. Elle fera tout pour empêcher que l’empereur ait un enfant d’une autre femme, allant jusqu'à faire massacrer le convoi de la concubine Park, enceinte de l’empereur, par une horde de bandits. Baek Jin-hee se montre parfaite dans le rôle de cette femme détestable, qu’elle parvient à rendre touchante, à certains moments.
A 15 ans, Baek Jin-hee était mannequin et apparaissait dans des publicités. Après avoir suivi quelques années les cours de théâtre de l’université en section Art et cinéma, elle a été retenue pour interpréter une jeune fille rebelle qui se lie d’amitié avec un migrant du Bangladesh dans Bandhobi. La comédienne a tourné ensuite dans bon nombre de films et de séries, a reçu de nombreux prix et défendu l’égalité des sexes et les droits des filles en Inde. En 2023, on la retrouvait, attendrissante, dans une série romantique : Rattrapés par la réalité ! qui raconte les mésaventures de deux célibataires, un homme et une femme enceinte, qui contractent un faux contrat de mariage mais finiront par trouver le véritable amour ensemble. Nous le savions avant la série mais, tout au long de ses 51 épisodes, Empress Ki délivre des preuves renouvelées du talent de Baek Jin-hee.
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JeonGook-hwan interprète le grand conseiller Yeon Chul, qui fomente l’assassinat de l’empereur Khutugtu Khan, père de l’empereur Ta Hwan (Togoontömör) dans le but de gouverner indirectement l’empire. Comédien de théâtre, Gook-hwan est magnifique dans ce rôle, qu’il sert avec sa gestuelle et sa voix d’homme de scène.
Yoon Ah-Jung interprète la dame de cour Yeon, rôle pour lequel elle sera nominée dans la catégorie “meilleure seconde actrice” aux APAN Stars Awards 2013. Yeon et sa supérieure, la dame de cour Seo (Seo Yi-sook), forment les deux bras obéissant aux ordres de l’impératrice Tanashiri pour accomplir ses basses œuvres. Au début de la série, lorsqu’elle n’est encore que servante, Yeon tente de mater Seung-nyang (Ha Ji-won), servante comme elle, ne sachant pas encore à qui elle a affaire… Très à son aise dans ce rôle de peste au regard plein d’innocence, la comédienne participe également à la série romantique Rattrapés par la réalité ! dans laquelle elle interprète un joli rôle de mère célibataire.
Song Kyung-Chul interprète Jeok-Ho, l’ancien eunuque de l’empereur Yuan, qui s’enfuira du palais à l’assassinat de l’empereur par Yeon Chul et deviendra chef de village, grâce à une perruque et une fausse moustache qui le rendent méconnaissable. Le comédien partage de très belles scènes avec Ha Ji-won, particulièrement celle où elle cherche son bébé en hurlant de désespoir au bord de la rivière.
Il serait dommage d’oublier Jung Woong-in, à la fois drôle, pathétique, immonde mais également attachant dans le rôle de l’inquiétant Yeom Byung-Soo. Ce personnage se sentait trahi par son pays qui a anéanti sa famille, et par conséquent légitime à pointer son épée là où ça pouvait lui être le plus profitable. Il mourra lapidé par la foule et l’impératrice versera une larme, ce qui étonnera l’eunuque Bang : « Il ne vaut pas mieux qu’un ver. Pourquoi gâcher une larme ? » Dans un goryeo parfait, l’impératrice lui répond : « Il aurait été un bon mari, un père. Son visage est celui du peuple de Goryeo, ces gens que l’on n’a pas su protéger. » Un très beau rôle pour ce comédien que l’on retrouvera, en 2017, en compagnie de Song Kyung-Chul (Jeok-Ho) et Jo Jae-Yoon (Golta) dans un film musclé : The Prison, de Hyeon Na.
Le défi du moment
Chaque nouveau rôle constitue pour Ha Ji-won un nouveau défi. La comédienne précisera dans une interview que le principal défi auquel elle devait faire face pour jouer ce rôle était de passer d’un type d’émotion à l’autre selon le personnage qu’elle interprétait : jeune femme déguisée en garçon, puis servante au palais et enfin, impératrice. Laisser transparaître le désir de vengeance et aussitôt exprimer l’amour, sur une durée de 51 épisodes, sans paraître fatiguée, lui demandera une énergie surhumaine !
Meilleure nouvelle actrice MBC Drama awards 2013
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La femme détruit sa maison pour faire du bois de chauffage et le fermier tente de vendre sa vache, la seule chose qui lui reste, donc : « J'ai vendu ma vache pour les taxes, détruit ma maison pour du feu. Je ne sais pas comment survivre l'an prochain. La déesse de la miséricorde est calmement assise sur sa grande maison. »
extrait du poème de Sushi, poète du nord de Song
La diabolique impératrice Bayan Khutugh interprétée par Lim Ju-eum