Ha Ji-won et la peinture
L’image d’une artiste de passion et de défis.
La peinture est pour Ha Ji-won le prolongement de sa carrière d’actrice. C’est un autre défi, qui lui impose de ne plus jouer un rôle, mais de vivre chaque moment en étant elle-même, en laissant de côté, le temps qu’il faudra, les personnages qu’elle était dans ses films. Tout ce qui manquait à l’artiste pour organiser ainsi sa vie d’actrice et s’adonner à la peinture, c’était du temps libre. Elle en aura suffisamment à partir du moment où elle quittera Wellmade Starm pour créer sa propre agence artistique, Haewadal Entertainment.
Ce besoin de créer, Ha Ji-won l’exprimait déjà dans son enfance, quand elle démontait puis remontait des postes de radio, qu’elle dessinait en cachette en classe… « A l’école, je réussissais bien et j’écoutais mes parents. J’aimais dessiner depuis toute jeune et je dessinais dès que j’avais du temps libre, mais je ne rêvais pas de devenir artiste. Mes parents voulaient que je devienne médecin ou diplomate… »1 Plus tard, l’envie de se remettre au dessin et à la peinture entraînera Ji-won à faire des croquis dans sa voiture, en s’arrêtant au bord de la route, jusqu’à ce qu’elle décide, en 2019, de se remettre sérieusement à la peinture et s’impose une nouvelle organisation de son temps pour dessiner, peindre selon les thèmes qui lui viennent à l’esprit, le style qu’elle a choisi et qui dénote une rupture avec les stéréotypes, tend vers l’abstraction.
Dès lors, la comédienne prend le temps de vivre d’autres moments, de créer d’autres choses que les personnages qu’elle interprète, d’être plus autonome, de se libérer de la pression d’un certain entourage, qui l’empêche de profiter pleinement de sa vie. Un autre défi motive la comédienne, avec le même but : transmettre de l’énergie aux autres, toucher le cœur des gens. C’est pour cela qu’elle s’est tournée vers le métier d’acteur. « La peinture en est une extension » dira-t-elle2. C’est pour cela qu’elle va se tourner vers cet art, qui lui permet de nouer une nouvelle relation avec son public..
Pour sa première exposition3, Ha Ji-won choisit comme thème “Les relations humaines à l’ère du numérique : le commencement d’une relation”. Les relations dont il est question ne sont que des contacts à travers les réseaux sociaux. La société numérique anonyme est éphémère. Un de ses tableaux montre des corps enchevêtrés, sans tête. « Les relations dans le monde numérique peuvent être simples, diverses et pratiques mais, en même temps, elles sont facilement rompues. Je pense qu’il faut réapprendre à nouer de vraies relations. [...] L’exposition fait référence, précise Ha Ji-won, aux relations humaines sans visage que nous entretenons actuellement et souligne le fait que nous ne pouvons pas, en fin de compte, vivre seuls. »
« J’ai l’intention de continuer à me mettre au défi, d’offrir des missions expérimentales à tout le monde. »
En 2012, dans son ouvrage This Moment, Ha Ji-won écrivait : « Tous mes défis ont été relevés dans le cadre de la poursuite de mon rêve, dans le cadre du jeu d’acteur… Je pense que mon défi sera toujours lié au métier d’acteur. » Ha Ji-won est avant tout une artiste. Qu’elle s’exprime à travers son jeu d’actrice ou en utilisant une toile et des pinceaux, sa passion est tout aussi présente et ses défis, encore nombreux.
1 This Moment, Ha Ji-won, 2012.
2 Vogue Korea, Hyewon Hwang, 5 décembre 2023.
3 à l’Art Space Polarpo. « Utilisez vos cinq sens pour apprécier et profiter de l’espace d’exposition. Mon objectif est de créer un lieu qui soit plus que visuel. »
Une voiture s’arrête près d’une petite église désaffectée, au bord de la côte sauvage. Yoo Jae-heon (Kang Ha-neul) et Park Se-yeon (Ha Ji-won) descendent du véhicule et se dirigent vers l’église, transformée en atelier de peinture. En pénétrant dans les lieux, le jeune homme, s’étonne :
« A quoi ça sert, cet endroit ? — C’est mon atelier personnel. Je l’ai décoré moi-même. — Alors, tu as peint tout ce qui est ici ? — Bien sûr ! Ce sont tous les projets sur lesquels j’ai travaillé au fil des années. — Comment ça se fait que tu ne sois pas devenue une artiste, alors ? — Qu’on aime quelque chose ne signifie pas qu’on peut en faire sa carrière. — Mais les gens ne peignent pas autant lorsque l’art n’est qu’un passe temps pour eux ! — Peu importe combien cela fait battre ton cœur. — Comment ? Je pourrais abandonner l’hôtel ? — Pourquoi pas ? — Mais cet hôtel, c’est tout pour moi. Je lui ai consacré ma vie. — Tu n’as jamais regretté ? — Je ne crois pas. »
Yoo Jae-heon, dans le rôle du demi-frère de Park Se-yeon, qui vient de Corée du Nord : « Où je vivais, il y avait beaucoup de camarades qui ne pouvaient pas faire ce qu’ils aimaient. Peut-être est-ce pour ça que, quand je vois un camarade qui pourrait faire ce qu’il aime mais ne le fait pas, ça m'énerve. Si tu aimes autant peindre, comment ça se fait que tu ne le fasses pas ? — Je ne peux pas. Ça ne veut pas dire que je ne le ferai pas mais actuellement, je ne peux pas. »
On retrouvera ce clin d’œil de Ha Ji-won à son autre passion, l’art du dessin et de la peinture, dans la série Hospital Ship, en 2017.